Pour une politique industrielle de défense : Les firmes françaises d’armement et le livre blanc.
Pour une politique industrielle de défense : Les firmes françaises d'armement et le livre blanc.
Par Jean-Paul Hebert , 4 juin 2008
Les orientations à venir du livre blanc devraient définir le cadre général d’une politique industrielle de la défense, qui n’ a pas paru depuis 2002 être une priorité pour le ministère de la défense, la principale décision dans ce domaine étant la fusion de Snecma et Sagem pour former Safran, décision dont la rationalité économique n’était pas évidente. Pourtant, les firmes françaises comme les firmes européennes sont aujourd’hui à la croisée des chemins. La contraction de la part du PIB consacrée à la défense est une réalité dans les principaux pays européens. Dans le cas français, cette contraction voit ses effets aggravées par le poids des pensions ainsi que par la croissance des dépenses de personnels liées à la professionnalisation et par la croissance des dépenses d’opérations extérieures. Logiquement les dispositions du livre blanc dont la presse a fait état jusqu’à présent entraînent la remise en cause de certains grands programmes : le président de la république a déjà annoncé la réduction d’un tiers du volume de la composante aérienne de la force de dissuasion. Le lancement de la construction d’un deuxième porte-avions est sans cesse reculé. Le programme de frégate multi-missions (FREMM) annoncé pour 17 bâtiments (et 7 milliards d’euros) sera sans doute réduit à 12 unités. Le volume du programme de SNA Barracuda (6 bâtiments pour 8 milliards d’euros) peut sans doute comme d’autres programmes de même nature auparavant être réduit à quatre bâtiments. Les équipements terrestres (VBCI notamment) seront dorénavant construits pour doter des unités de taille contenue, projetées sur un théâtre d’opérations, et non plus pour équiper de manière standardisée toutes les unités. Dans cette perspective, notamment l’artillerie lourde n’aura plus la même place. Et la contrainte est du même ordre pour les chars Leclerc, comme le montrent les informations récentes sur l’éventuelle vente d’une partie du parc de chars existants. Ce mouvement va amplifier le phénomène de rabotage de la loi de programmation 2003-2008 que nous avions analysé précédemment.
Les entreprises vont donc se trouver confrontées à des difficultés nouvelles. Pourtant, le tissu industriel français de l’armement a connu une transformation profonde ces dernières années, notamment une concentration marquée : quand en 1990, Jean-Michel Boucheron présentait la loi de programmation 1990-1993, son volumineux rapport publiait les fiches des trente-sept première entreprises françaises du secteur. On avait déjà souligné combien la transformation de cet ensemble était importante . On le constate encore plus en voyant que la commission des affaires étrangères du sénat, pour rédiger son rapport sur l’industrie de défense dans la perspective du livre blanc, peut se borner à auditionner six responsables d’entreprise : EADS, Thales , Safran, DCNS, Nexter et Dassault aviation. Si l’absence de Zodiac ou CNIM peut se comprendre, celle de la SNPE est moins évidente.
Car dans la dernière période (2000-2006), les sociétés issues des anciens arsenaux ont vu leurs effectifs se contracter sévèrement : -20% pour SNPE, -22% pour DCNS, -67% pour Nexter. Si les chiffres d’affaires totaux de EADS et DCNS ont fortement progressé, ceux de Dassault (-15%) et SNPE ont reculé. Mais les chiffres d’affaires « défense » n’ont pas baissé : pour les sept entreprises ce montant a même augmenté de 45% . toutefois c’est précisément ce dernier résultat qui risque d’être remis en cause dans la période qui s’ouvre. Une certaine approche du sujet voudrait que la solution soit dans l’exportation. C’est là, prendre un risque important, étant donné les caractéristiques singulières des marchés d’exportation ; c’est surtout négliger l’élément fondamental d’une politique d’armement qui est la construction d’une autonomie européenne.
Sources CIRPES
Posté par Adriana Evangelizt