Le fichier Edvige remodelé par Matignon
Le fichier Edvige remodelé par Matignon
ARIS (Reuters) - Le fichier de police Edvige, objet de vives critiques à droite comme à gauche, va être profondément modifié dans un nouveau projet de décret qui sera soumis ce vendredi pour avis à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), annonce Matignon.
Le nouveau décret ne permettra plus le recensement de personnalités politiques, syndicales ou religieuses. Il exclut toute mention relative à la sexualité ou à la santé et se limite aux problèmes de sécurité, avec toujours la possibilité de ficher à ce titre des mineurs à partir de 13 ans.
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Les syndicats CFDT, CGT, FSU et Solidaires disent dans un communiqué commun regretter "l'absence d'informations précises sur le contenu et les garanties liées aux trois nouveaux fichiers en passe d'être créés".
Elles déplorent le maintien du fichage des mineurs, s'interrogent sur la possibilité d'un droit d'accès au fichier et répètent leur voeu d'un débat parlementaire. Les opposants à Edvige ont promis une journée d'action le 16 octobre, jour de la Sainte-Edwige.
François Hollande, interrogé sur TF1, a déploré pour sa part que le gouvernement ait choisi la voie réglementaire.
"Je regrette qu'il n'y ait pas un débat au Parlement parce que ce sont des principes essentiels qui sont en cause", a déclaré le premier secrétaire du Parti socialiste pour qui il "reste des zones d'ombre" dans Edvige.
"Qui va pouvoir consulter ces fichiers et est-ce que les citoyens eux-mêmes vont pouvoir avoir accès aux informations qui les concernent?", s'est-il interrogé.
François Fillon, qui a diffusé l'annonce peu avant l'audition de la ministre de l'Intérieur, Michèle Alliot-Marie, par la commission des Lois de l'Assemblée nationale, exclut implicitement tout réexamen du dossier par les députés, souhaité notamment par le secrétaire général de l'UMP, Patrick Devedjian.
Il donne satisfaction au président Nicolas Sarkozy qui avait appelé de ses voeux le 11 septembre une solution "dans les tout prochains jours". Les modifications apportées sont celles suggérées le 9 septembre par le chef de l'Etat, lorsqu'il avait convoqué en urgence à l'Elysée une réunion avec Michèle Alliot-Marie et François Fillon.
"RÉPERTOIRES" POUR LES PERSONNALITÉS
Ces derniers étaient jusque là restés de marbre face à la mobilisation croissante contre ce fichier, qui remettait en forme et élargissait un ancien instrument des Renseignements généraux, officialisé en 1991.
La fronde avait gagné le patronat avec le "trouble" exprimé par la présidente du Medef, Laurence Parisot, et le fichier suscitait les réticences des députés UMP.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, la commission des Lois de l'Assemblée nationale a encore adressé à l'unanimité neuf recommandations au gouvernement pour modifier le fichier.
Le nouveau texte renonce à recenser les informations relatives aux personnalités "exerçant un mandat ou jouant un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif", ce qui était prévu par le décret du 1er juillet.
Des "répertoires administratifs" recensant ces personnalités pourront être tenus à des fins pratiques dans les préfectures de région, avec les seules mentions des identités, des fonctions et les coordonnées personnelles, a précisé Michèle Alliot-Marie à l'Assemblée.
"Le décret devra prévoir explicitement qu'aucune donnée touchant à l'orientation sexuelle ou à la santé des personnes intéressées ne peut être collectée, même à titre exceptionnel", ajoute Matignon.
Est en revanche maintenue la possibilité de ficher à partir de 13 ans les mineurs susceptibles de "porter atteinte à la sécurité publique", mais avec une possibilité de radiation du fichier à leur majorité si aucun élément nouveau ne survient.
La formulation semble par ailleurs plus restrictive que celle du décret de juillet qui parlait de personnes susceptibles de porter atteinte "à l'ordre public".
Dans sa nouvelle définition, le fichier pourra recenser "des personnes dont l'activité individuelle ou collective indique qu'elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique ainsi que les personnes entretenant ou ayant entretenu des relations non fortuites avec elles".
Est en outre prévu le recensement de "personnes travaillant dans des secteurs ou des domaines sensibles et faisant à ce titre l'objet d'enquêtes administratives", ce qui semble renvoyer par exemple aux employés des secteurs relatifs à la défense nationale.
Thierry Lévêque, édité par Gilles Trequesser
Sources Le Monde
Posté par Adriana Evangelizt