La défense européenne passe-t-elle par l'Otan ?
La défense européenne passe-t-elle par l'Otan ?
Débat animé par Jean-Dominique Merchet
Jean-Marie Bockel Secrétaire d’Etat à la Défense et aux Anciens combattants
Construire l’Europe de la défense est une priorité pour la France. Partout en Europe, les citoyens attendent de leurs responsables politiques que la défense européenne progresse. L’UE peut jouer son rôle sur la scène internationale. Mais les menaces auxquelles nous sommes confrontés ont évolué. Le terrorisme est devenu omniprésent et de nouvelles faiblesses sont apparues. Or les moyens et l’organisation militaire de l’UE ne sont pas en mesure d’apporter toutes les réponses, en termes de projection et de renseignement. Les budgets que les Européens consacrent à leur défense sont trop faibles. Il manque une industrie de défense forte, soutenue par une volonté, en termes de recherche et de développement. Il est indispensable que l’Europe rehausse collectivement ses capacités au niveau de son potentiel économique et technologique. Par ailleurs, l’Otan est une alliance qui a assuré plus d’un demi-siècle de paix et contribue à notre sécurité collective. Le partenariat entre l’Otan et l’UE n’est pas une question militaire mais politique : c’est d’une part la liberté d’action et la cohérence de l’UE et d’autre part l’efficacité et la crédibilité de l’Otan. Il est indispensable que l’Otan et la Politique européenne de sécurité et de défense (Pesd) se développent en complémentarité. La France, associée plus étroitement au fonctionnement de l’Otan, contribuera à faire progresser ces deux organisations de sécurité indispensables et nécessaires.
Paul Quilès Ancien ministre de la Défense
Durant quarante ans, l’Otan a représenté le bras armé de ce qu’on appelait «le monde libre». La place prépondérante des Etats-Unis en son sein, tant dans les moyens que dans les mécanismes décisionnels, en a très souvent donné l’image d’une machine de guerre au service des intérêts américains. L’Otan aurait pu disparaître, parallèlement à la dissolution du pacte de Varsovie et à la fin de l’URSS. Tel n’a pas été le choix des Américains et de leurs alliés, qui ont redéfini le rôle de l’organisation. Le conflit était inévitable avec une défense européenne, certes embryonnaire et hésitante, mais qui doit être incontournable et autonome si l’Europe veut peser sur la scène internationale.
La défense européenne peut être complémentaire de l’Otan pour certaines missions mais il est illusoire de penser que sa construction doit se faire dans l’Otan. Qui pourrait croire que les Américains accepteraient d’abandonner leur leadership et de voir leurs choix stratégiques contestés au sein de l’Otan ? C’est ce que Sarkozy a tenté de faire croire pour justifier le retour de la France dans la structure militaire intégrée de l’Otan. En réalité, on n’a rien vu venir de cette promesse, pour la bonne raison que cette décision a un sens politique précis : l’alignement sur la politique de Bush. On a déjà pu en juger les effets, avec l’envoi de troupes françaises supplémentaires en Afghanistan. Ce choix n’est pas un service rendu à la France, à l’Europe et à leur contribution à la paix dans le monde.
Sources : Libération
Posté par Adriana Evangelizt