Villepin réfute en bloc et met en garde Sarkozy
Villepin réfute en bloc et met en garde Sarkozy
par L.Farge avec Paul Joly
Tout ce qui est dit est faux". Invité mardi soir de France 2, Dominique de Villepin a démenti les dernières notes du général Philippe Rondot publiées par "Le Monde" sur la nécessité de le "protéger" dans le dossier Clearstream. Il a affirmé qu'on voulait l'impliquer dans une affaire politique en voulant construire de toutes pièces une rivalité avec Nicolas Sarkozy. Et de mettre implicitement le ministre de l’Intérieur en garde sur l'interférence entre l'action gouvernementale et les ambitions électorales pour 2007.
"Tout ce qui est dit est faux", selon Villepin
Dominique de Villepin tente de reprendre la main dans le dossier Clearstream. Invité de France 2 mardi (23 mai), le Premier ministre a présenté les informations publiées dans la presse comme une "construction" destinée à "l'impliquer dans une affaire politique" à un an de l'élection présidentielle. Pour sa première intervention télévisée depuis le 12 mars, le chef du gouvernement était interrogé depuis Bordeaux, où il s'était rendu dans l'après-midi pour rencontrer les salariés de la Sogerma, cette filiale du groupe EADS menacée de fermeture (Lire l'article). "Je ne suis pas dupe. Tout ce qui est dit est faux", a lancé le chef du gouvernement, très offensif.
Interrogé sur les informations du quotidien "Le Monde" qui a reproduit des notes confidentielles du général Philippe Rondot, il a ajouté : "Nous sommes là dans une multiplication d'écrits qui sont découpés, mis bout à bout et que l'on veut faire parler". Le quotidien du soir affirmait mardi que l’ancien espion n'avait pas livré, le 28 mars lors de sa première audition devant les juges, le nom de Jean-Louis Gergorin, auteur de deux courriers anonymes dans l'affaire et proche de Dominique de Villepin, afin de "protéger" le Premier ministre. "Je ne crois pas qu'on puisse reconstruire les faits notamment à partir de 2006, en faisant parler 2004", a-t-il ajouté.
Au passage, le Premier ministre, désireux de réaffirmer son autorité sur le gouvernement, a adressé une mise en garde à son rival Nicolas Sarkozy, en souhaitant qu'il "n'y ait pas d'interférence entre l'action gouvernementale, qui doit être menée jusqu'au bout", et la campagne présidentielle. Il a affirmé avoir "souvent évoqué cette question" avec le ministre de l'Intérieur. "Viendra le temps de la campagne et notre famille politique a pris l'engagement que cette campagne ne débute qu'au début 2007, que le choix se fasse au début 2007", a-t-il affirmé. A un an du scrutin majeur, Dominique de Villepin reste donc combattif.
Gergorin convoqué la semaine prochaine
Jean-Louis Gergorin est convoqué en début de semaine par les policiers pour être entendu sur son rôle dans cette histoire qui a ébranlé le plus haut sommet de l'Etat. Sauf changement de dernière heure, le rendez-vous est prévu mardi. Pas devant les juges Jean-Marie D'Huy et Henri Pons, au Pôle financier du Palais de justice de Paris. Mais à Nanterre, devant les policiers spécialisés de la Direction nationale des investigations financières. Ce qui signifie que l'ex-responsable d'EADS, celui qui apparaît comme le "corbeau" dans ce dossier, va être très probablement placé en garde à vue.
Les enquêteurs ont prévu de longuement l'interroger sur son rôle dans cette affaire , avec toute une série de points à éclairicir : comment par exemple s'est-il procuré fin 2003 les fameux listings bancaires de Clearstream ? Jean-Louis Gergorin a, jusqu'ici, refusé de répondre à cette question, indiquant qu'il couvrirait coûte que coûte sa source, même s'il doit aller en prison. Interrogations encore sur ses liens avec les autres acteurs : Dominique de Villepin, le général Rondot, ou encore l'informaticien Imad Lahoud, soupçonné d'avoir manipulé les listings. Bref une convocation très attendue, d'ores et déjà présentée comme un tournant du dossier.
Madelin dans le bureau des juges
Le conseiller du gouvernement en charge du renseignement économique, Alain Juillet, a reconnu lors de la perquisition de son bureau le 30 mars avoir détruit un dossier concernant l'affaire Clearstream, croit savoir jeudi (25 mai) "Le Parisien". Nommé en 2004 "haut responsable chargé de l'intelligence économique" par le Premier ministre d'alors, Jean-Pierre Raffarin, il aurait avoué devant les juges d'Huy et Pons avoir "détruit le dossier" il y a environ six mois.
Pendant ce temps, le défilé se poursuit dans le bureau des juges qui tentent d’avancer dans ce dossier. Après le général Rondot (resté muet comme une carpe !) lundi, et le directeur de cabinet de Michèle Alliot-Marie mardi, c’était au tour d’Alain Madelin d’être entendu comme partie civile. Accompagné de son avocat Me Jean-Marc Fedida, l'ancien ministre de l'Industrie est arrivé peu avant 9h30 mercredi au Pôle financier du tribunal de grande instance de Paris. Il en est ressorti deux heures plus tard. Il a demandé aux juges de démasquer "les manipulateurs, les magouilleurs", ainsi que la levé le secret-défense sur la vente des frégates à Taïwan en 1991. Le nom de Madelin apparaissait dans les listings adressés anonymement au juge Renaud van Ruymbeke qui enquêtait sur de possibles rétro-commissions lors de cette vente.
Imad Lahoud, l'informaticien soupçonné d'avoir trafiqué les listings informatiques reçus par la justice, sera-t-il le prochain à être auditionné ? En tout cas, il est sorti de l'hôpital où il avait été admis la semaine dernière. Il se remet d'une dépression consécutive à sa mise en cause dans l'affaire. Mardi matin, Philippe Marland a rencontré pendant plus de trois heures les juges Jean-Marie d'Huy et Henri Pons. Entendu comme témoin, il n'a fait aucune déclaration à sa sortie du bureau des magistrats. Ceux-ci voulaient savoir si Michèle Alliot Marie et son directeur de cabinet avaient été informés de la rencontre secrète entre Jean-Louis Gergorin, supposé corbeau de l'affaire, et le juge Renaud van Ruymbeke. Début mai, Philippe Marland avait expliqué que le général Rondot, agent des services secrets, menait une enquête sur une première liste accusant certains fonctionnaires du ministère de corruption. Lundi, la commission consultative du secret de la défense nationale a été saisie : elle a deux mois pour décider de lever le secret défense sur des documents saisis lors de l'enquête.
Le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy avait été le premier politique, partie civile dans ce dossier, à être entendu par les juges Jean-Marie d'Huy et Henri Pons, le 9 mai. Le député socialiste Dominique Strauss-Khan et l'ancien ministre de la Défense Jean-Pierre Chevènement, tous deux parties civiles dans cette affaire car également accusés à tort de détenir des comptes occultes via l'institution luxembourgeoise Clearstream, ont aussi été entendus la semaine dernière.
Sources : TF1
Posté par Adriana Evangelizt