Le sombre diagnostic sur les banlieues du maire de Vénissieux
Le sombre diagnostic sur les banlieues du maire de Vénissieux
par Catherine Lagrange
"On se prépare des lendemains douloureux". Elu à Vénissieux depuis 1985, près de Lyon, le député-maire communiste André Gerin porte un regard pessimiste sur l'évolution des banlieues un an après les violences de l'automne 2005.
C'est à Vénissieux, ville-symbole du mal-être des banlieues françaises, qu'éclatèrent les premières violences urbaines en 1983. Le 3 décembre 1983, la "marche des beurs" emmène 100.000 personnes à Paris pour l'égalité des droits.
"Je vois, depuis que je suis élu, les choses évoluer de façon négative, ça va de mal en pis", souligne André Gerin, 60 ans, dans une interview à Reuters.
De ces deux décennies troublées, il retient deux dates-clés.
1985, l'été chaud qui enflamma le quartier du Mas du Taureau dans la commune voisine de Vaulx-en-Velin, et 2005, l'automne sous tension des banlieues françaises.
"Avec une différence essentielle entre les deux événements", nuance André Gerin. "Les violences ne se limitent plus aujourd'hui aux seules banlieues, elle touche toute la société française, y compris les Dom-Tom"».
""Et ça, c'est nouveau, je crois qu'on ne l'a pas assez souligné. Depuis 2005, on est entré dans une autre problématique", juge-t-il.
Le gouvernement défend son action, en matière d'emploi et de rénovation urbaine notamment, depuis les violences de 2005, mais André Gerin ne voit pas d'amélioration.
"Chômage des moins de 25 ans, paupérisation, éducation, logement: aucun de ces indicateurs ne s'améliore. Pourtant, les maires ne cessent de tirer la sonnette d'alarme et d'entreprendre des actions sur le terrain", affirme-t-il.
Mercredi soir, un bus a été incendié à Vénissieux.
Au-delà des incidents, André Gerin parle d'une "fracture de la jeunesse" et d'une "fracture civique et politique".
DES JEUNES "HORS JEU"
Il n'hésite pas ainsi à relier "les émeutes de novembre, poussées par la haine et la rage, et le mouvement contre le CPE", qui a poussé la jeunesse dans la rue au printemps dernier.
"Il y a peut-être des concordances dans ce que les jeunes ont cherché à exprimer dans ces deux mouvements: pour moi, les manifestations contre le CPE sont un signal positif alors que les émeutes urbaines sont un signal d'alarme négatif".
"Je ne vois pas de prise en charge politique sur les problèmes que rencontre notre jeunesse", déplore-t-il.
A-t-il des solutions? Le député-maire de Vénissieux s'avoue désarmé.
"Il faut absolument que cette société trouve en premier lieu des réponses significatives pour la formation et l'emploi de ces jeunes entre 16 et 18 ans qui sont totalement hors jeu", explique-t-il. "Ce ne sont pas forcément des délinquants, mais ils sont à disposition de ceux qui vivent du mal-être des gens", analyse-t-il.
Dans ce sombre tableau, l'élu communiste relève toutefois une lueur d'espoir: l'éveil à la citoyenneté.
"Il y a peut-être eu pour la première fois de façon significative une mobilisation citoyenne", note-t-il.
"On a assisté à une certaine prise de conscience civique de jeunes qui ne sont pas mis à l'écart et qui essaient de raisonner ceux qui y sont".
Il dit même avoir été frappé par "le dialogue qui s'est instauré entre les jeunes et la police".
Il se réjouit également des nouvelles inscriptions sur les listes électorales (700 à ce jour) et s'apprête à entrer en campagne pour que le mouvement s'amplifie pendant les derniers mois de l'année.
Pour autant, André Gerin ne voit pas dans les prétendants à l'Elysée un candidat dans lequel "se reconnaisse cette jeunesse".
Sources : Boursier com
Posté par Adriana Evangelizt