Société Générale: les zones d'ombre persistent

Publié le par Adriana EVANGELIZT

 

 

Société Générale: les zones d'ombre persistent


par Guillaume Evin

 

Au lendemain de l’un des plus retentissants scandales de l’histoire financière, les questions abondent. Certaines n’ont toujours pas trouvé de réponse claire.

Au-lendemain de la déflagration qui a secoué la Société Générale et frappé de stupeur les milieux financiers, la fraude à 5 milliards d’euros est loin d’avoir livré tous ses secrets. Les marchés ont toujours du mal à apprécier la situation. Dans des volumes très nourris, l’action Société Générale s’octroyait près de 2% vendredi dans l’après-midi avant de se replier nettement et de clôturer sur un recul de 2,56%. La veille, le titre avait lâché 4,1%. Depuis le début de l’année, sa capitalisation a fondu d’un quart et de 45% en un an.

Le gouvernement s'est engagé à faire toute la lumière sur une affaire qui reste encore entourée de nombreuses zones d'ombre. François Fillon a ainsi chargé Christine Lagarde, sa ministre des Finances, d’élucider les faits « sous 8 jours » afin le cas échéant de « proposer des solutions » tout en déplorant que le gouvernement aurait « peut-être pu être prévenu plus tôt ». En visite en Inde, Nicolas Sarkozy y allait également de son couplet rassurant quoique laconique sur le système : « Cette fraude interne n’a pas touché la solidité ni la fiabilité du système financier français ». Le Nouveau Centre de son côté exhortait en revanche Christine Lagarde de monter sans délai « une commission d’enquête pour faire toute la vérité sur le scandale ».

La justice patine au démarrage

De son côté, l'appareil judiciaire se met aussi en branle... non sans difficulté. Le fait est que le parquet de Paris et celui de Nanterre ont semblé se disputer le dossier. L’un et l’autre revendiquant la légitimité de la procédure. Finalement, le premier l’a emporté et a décidé de rapatrier l’ensemble des plaintes. Des investigations préalables seraient nécessaires selon le bureau du procureur de Paris : « Avant même que l'enquête policière ait démarré, le coupable est déjà désigné. Il faut savoir raison garder. Il faudra voir ce qu'il y a dans le dossier de la Société générale », a-t-on déclaré au cabinet du magistrat. Par ailleurs, on ignorait toujours vendredi en fin d’après-midi ce qu’est devenu Jérôme Kerviel, l’homme qui aurait volé 5 milliards. D’après son avocate, toutefois, le jeune golden boy ne serait pas en « fuite ». Reste maintenant à répondre aux questions de fond.

Comment les multiples procédures de contrôle de la banque ont-elles pu être déjouées de la sorte ?

Le mystère demeure entier pour l’instant. « C’est qu'il est difficile pour chacun d'entre nous de comprendre comment une personne seule peut, dans un délai relativement court, occasionner des pertes aussi considérables dans un établissement bancaire par ailleurs sérieux et solide » concédait le Premier ministre. Même incompréhension teintée de reproches chez François Sauvadet, le président du Nouveau Centre : « Comment un simple trader a pu déjouer tous les systèmes de sécurité mis en place par la banque en interne et prendre des positions aussi dangereuses et contraires aux règles de sécurité édictées par la banque elle-même ? »

La fraude du trader masque-t-elle un vrai scandale financier ?

C’est l’hypothèse qui taraude tout le monde dès lors qu’il apparaît improbable qu’un simple employé d’une salle de marché ait pu tenir des positions aussi vertigineuses. L’exposition totale de Jérôme Kerviel aurait été chiffrée en effet entre 50 et 60 milliards d’euros. Soit le double quasiment des fonds propres de la SG qui se montaient à 30 milliards fin septembre. Voilà pourquoi certains émettent des doutes sur le scénario servi hier par la direction du groupe. Et François Sauvadet du Nouveau Centre de se demander si ce désastre financier « ne masque pas des positions inconsidérées prises par la Banque depuis le début de la crise des subprimes ». Mais pour l’heure force est d’admettre qu’aucun fait tangible ne vient étayer cette analyse même si Le Parisien allait jusqu’à s’interroger sur un éventuel délit d’initiés entre le vendredi 18 et le mercredi 23.

La SG est-elle responsable du mini-krach boursier survenu lundi 21 ?

Le groupe dirigé par Daniel Bouton a découvert le désastre vendredi soir. Son objectif était alors clair : « Ne pas se lancer dans une spéculation hasardeuse et déboucler au plus vite les positions prises par le fraudeur, rappelait le PDG de la SocGen. Mais vu le contexte boursier et l’urgence de la situation, cela revenait à vendre à perte ». Ce qui s’est effectivement passé. Pendant trois jours, de lundi à mercredi, l’établissement s’est donc acharné à fermer une à une sur l’Eurostoxx 50, le Dax et le Footsie les positions inconsidérées prises par son courtier, quitte à accepter de perdre gros. De sorte que, sans être directement responsable du trauma boursier de lundi dernier, l’attitude de la banque au logo rouge et noir l’a mécaniquement amplifié. Car, pour liquider des positions qui font perdre près de 5 milliards, cela signifie qu’il faut en engager environ dix à quinze fois plus en volume.

D’après Lionel Jardin de Global Equities, cette fourchette de 50 à 60 milliards d’euros placés sur les marchés à terme représente « plus d’un million de contrats sur l’indice Eurostoxx, soit, l’équivalent d’une séance standard (…) On comprend enfin pourquoi on a vu les volumes d’échanges atteindre des niveaux record cette semaine, plus du double des volumes habituels, avec des mouvements d’une grande violence qui ont accru la fébrilité ». Dans ce contexte erratique, l’irrationalité des marchés a fait le reste avec en toile de fond le spectre de la récession aux Etats-Unis : « Les investisseurs ont cherché des explications à cet afflux d’ordres, sans en trouver, avant d’amplifier la baisse à leur tour » ajoute Lionel Jardin. « Un marché qui a des raisons d’être nerveux devient susceptible. S’il arrive quoi que ce soit pour aggraver la tension, ça n’arrange vraiment rien » complète Anthony Scott, un vendeur d’actions à la City de Londres.

Outre-Atlantique, certains vont même plus loin. Et quelques spécialistes de subodorer que l’opération commando menée par la SocGen a non seulement provoqué la chute des marchés actions mais du même coup "piégé" la Fed américaine, en la poussant à abaisser ses taux directeurs de manière spectaculaire. « La Fed a-t-elle été piégée ? » titrait ainsi l’éditorialiste David Gaffen dans un blog publié par le Wall Stret Journal allant jusqu’à écrire : « Pour être clair, ils [les gouverneurs] sont tombés dans le panneau ». Pour Jérôme Jardin de Global Equities, cette interprétation est juste « complètement ridicule (…) Je ne peux pas croire que la Fed décide d’abaisser ses taux pour quelques jours de volumes inhabituels sur les contrats à terme ». Même son de cloche chez Meeschaert où le gérant Frédéric Rozier estime que cette vision des anglo-saxons relève du « pur fantasme ». Et un trader cité par Le Monde de lâcher : « Si un courtier de 31 ans a pu piéger la Fed, ça devient très inquiétant ! »

Sources L'Expansion

Posté par Adriana Evangelizt

 
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D
il ne s'agit pas d'un seul trader.de la source même de la S.G. : beaucoup de têtes sont déjà tombées. et les licenciements concernent aussi des grosses têtes de la direction.
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