Plan Bush: le Congrès se résigne

Publié le par Adriana EVANGELIZT






Plan Bush: le Congrès se résigne


Il aura fallu 150 milliards de plus pour convaincre les représentants

 Il aura fallu ajouter 150 milliards en crédits d'impôt et autres mesures douces aux oreilles des électeurs pour finalement convaincre une majorité de membres de la Chambre des représentants de voter en faveur du plan de sauvetage de 700 milliards proposé par l'administration Bush depuis deux semaines afin de secourir l'industrie financière et Wall Street de la crise majeure qui les secoue.

Toutefois, même l'adoption de ce plan, présenté comme «une nécessité», n'a pas soulevé l'enthousiasme dans le monde financier, pas plus que celui de George W. Bush, comme il l'a lui-même démontré dans une brève déclaration faite immédiatement après avoir promulgué la «Loi de stabilisation économique d'urgence de 2008»: «Les Américains doivent s'attendre qu'il va falloir un certain temps avant que cette loi ait son plein impact dans notre économie. Il faudra une analyse attentive et des discussions pour que les autorités appliquent cette loi de façon responsable. Cela ne peut pas être fait du jour au lendemain. Nous prendrons le temps nécessaire pour mettre au point un programme efficace qui atteint les objectifs et qui ne gaspille pas l'argent des contribuables.»

Le président n'a pas fait l'autruche devant la situation économique générale puisqu'il a terminé sa déclaration en rappelant qu'hier matin on annonçait une perte de 150 000 emplois aux États-Unis en septembre, le double du mois précédent et la neuvième baisse mensuelle consécutive pour un total de 760 000 emplois perdus.

Les milieux boursiers ont pour leur part exprimé leur humeur par une baisse de 1,5 % au Dow Jones et de 1,48 % sur le Nasdaq. Il faut comprendre que les investisseurs américains vont attendre de voir les effets concrets de cette loi avant de conclure que la crise est vraiment maîtrisée et en voie d'être résorbée. En revanche, le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, a applaudi aux mesures prises par le Congrès. «Cette loi est une étape cruciale vers la stabilisation de nos marchés financiers et pour assurer que le crédit soit canalisé sans entrave vers les ménages et les entreprises», a-t-il déclaré.

Par ailleurs, il sera fort intéressant de voir quelles seront les retombées sur le plan politique de ce qui s'est passé à Washington depuis deux semaines.

Adoptée par le Sénat mercredi, la nouvelle version du texte a été approuvée par 263 voix contre 171 lors de ce vote très attendu de la Chambre basse du Congrès. Il y a tout de même eu 108 républicains qui ont voté contre l'adoption de ce plan pour seulement 91 qui ont voté en faveur, comme l'ont fait aussi 172 démocrates. Barack Obama, le candidat à la présidence, a lui-même téléphoné à au moins 70 représentants démocrates pour leur demander de donner leur appui à ce projet de loi, après qu'ils eurent voté contre lors d'un premier vote. M. Obama n'a pas tardé à se féliciter de l'adoption de la loi hier et il est bien évident qu'il va chercher à capitaliser sur cette victoire jusqu'à la fin de la campagne présidentielle, tout en continuant de rejeter entièrement le blâme de la crise financière sur le dos des républicains.

De son côté, le président Bush ne pouvait que remercier ceux qui ont collaboré avec son administration: «Il y a eu des moments cette semaine où certains ont pensé que le gouvernement fédéral ne pouvait pas relever le défi. Mais grâce au dur travail des membres de chaque parti, dans les deux chambres, et à l'esprit de coopération entre le Capitole et mon administration, nous avons terminé cette loi dans les temps. Je sais que certains Américains ont des inquiétudes sur cette loi, en particulier sur le rôle du gouvernement et le coût de la loi. En tant que fervent partisan de la libre entreprise, je crois que le gouvernement ne doit intervenir que lorsque c'est nécessaire. Dans cette situation, une action est clairement nécessaire.» Le secrétaire américain au Trésor, Henry Paulson, architecte du plan, a promis de son côté une mise en oeuvre rapide de la loi.

À la Chambre des représentants, l'annonce du résultat du vote a été saluée par des applaudissements. La présidente démocrate de la Chambre, Nancy Pelosi, a souligné que l'adoption du plan était nécessaire pour «la stabilité financière de notre pays et la sécurité économique de notre population». Le leader de la minorité républicaine à la Chambre, John Boehner, avait de son côté déclaré que «chacun sait que nous sommes en pleine crise financière. Et nous savons que, si nous ne faisons rien, la crise va probablement empirer et nous plonger dans un effondrement comme la plupart d'entre nous n'en ont jamais vu».

Le plan défendu par l'administration Bush avait été rejeté lundi par 228 voix contre 205 à la Chambre des représentants. Mais il s'est vu offrir une nouvelle chance lorsqu'une version étoffée incluant des baisses d'impôt et un relèvement du plafond de garantie par l'État des dépôts bancaires a été adoptée à une large majorité (74 voix contre 25) au Sénat deux jours plus tard. C'est sur cette nouvelle version que se sont prononcés les représentants hier. Les changements apportés au plan ont, semble-t-il, atténué l'opposition des représentants républicains, principaux artisans de l'échec du vote de lundi.

Le plan

Le plan élaboré initialement par M. Paulson vise à protéger la valeur de l'épargne et des biens immobiliers des contribuables, à préserver la propriété, à promouvoir la croissance économique et à maximiser le retour sur investissement. En 12 jours, ce plan a subi des transformations substantielles, comme l'indique le nombre de pages, qui est passé de trois à 451! La loi promulguée hier fixe une limite dans le temps au plan de sauvetage, soit au 31 décembre 2009. Sa durée peut être étendue à la demande du gouvernement, pour un maximum de deux ans après l'adoption de la loi.

Le plan comprend aussi des garanties pour les contribuables.

Possibilité pour le Trésor d'acheter dans un premier temps, jusqu'à hauteur de 250 milliards de dollars, des actifs invendables, un montant pouvant être relevé jusqu'à 350 milliards à la demande du président. Un droit de veto du Congrès sera requis pour les achats dépassant ce montant, qui ne pourra pas dépasser 700 milliards.

Prise de participation de l'État au capital et aux profits des sociétés bénéficiant du plan, permettant de dégager des bénéfices si les conditions de marché s'améliorent.

Mandat accordé au secrétaire au Trésor pour se coordonner avec les autorités et les banques centrales d'autres pays afin de mettre en place des plans similaires.

La nouvelle version adoptée au Sénat comporte en outre deux dispositions.

Le plafond de la garantie accordée aux déposants en cas de faillite de leur banque est porté de 100 000 à 250 000 $, pour un an.

Des crédits d'impôt à la classe moyenne et aux entreprises ont été introduits.

Limitation des indemnités de départ pour les dirigeants.

Interdiction des parachutes dorés pour les p.-d.g. ou les dirigeants licenciés ou démissionnant après avoir travaillé dans des sociétés qui ont vendu des actifs au Trésor, tant que le Trésor en est actionnaire.

Limitation des indemnités encourageant des prises de risque inutiles. Plafond de 500 000 $ pour les rémunérations de dirigeants pouvant bénéficier de déductions fiscales.

Remboursement des primes accordées sur des espoirs de gains en fin de compte non réalisés.

Surveillance et transparence.

Supervision de la mise en oeuvre du plan par un conseil de surveillance où siégeront le président de la Réserve fédérale, le secrétaire au Trésor et le président de la SEC, le régulateur boursier.

Présence de la Cour des comptes (GAO) au Trésor pour superviser le plan de rachat des actifs et réaliser des audits.

Nomination d'un inspecteur général indépendant pour surveiller les décisions du secrétaire au Trésor.

Examen par la justice des mesures du secrétaire au Trésor.

Mesures contre les saisies immobilières.

Mesures de protection pour les propriétaires menacés de saisie de leur logement, alors que jusqu'à deux millions de saisies sont prévues pour 2009.

Autorisation pour l'État de réviser les conditions des prêts hypothécaires accordés aux emprunteurs en difficulté.

Aide aux petites banques locales touchées par la crise du crédit hypothécaire.

En ce qui concerne les réactions des Bourses à l'extérieur des États-Unis, on a vu à Toronto une baisse de 97,19 points de l'indice S&P/TSX et celui de Nasdaq Canada a régressé de 12,48 points. Les Bourses européennes ont rebondi hier, anticipant une adoption du plan. À Paris, le CAC 40 a clôturé en hausse de 2,96 % alors qu'à Londres le FTSE 100 a fini en hausse de 2,26 %. Wall Street était en hausse à l'ouverture. En revanche, en Asie, les marchés ont terminé en repli dans le sillage de la baisse enregistrée à Wall Street jeudi.

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Avec l'Agence France-Presse, la Presse canadienne et Associated Press

Sources
Le Devoir

Posté par Adriana Evangelizt

Publié dans DETTE-DEFICIT-ECONOMIE

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