L'affaire Clearstream et les coffres de la République
L'affaire Clearstream et les coffres de la République
Franz-Olivier Giesbert, directeur de l'hebdomadaire Le Point, est catégorique. En juillet 2004, Dominique de Villepin aurait commenté ainsi "l'affaire Clearstream": "Sarkozy, c'est fini. Si les journaux font leur travail, il ne survivra pas à cette affaire-là". Le Premier ministre nie ces propos... le journaliste les maintient.
Le 28 mars, 2006, le général Philippe Rondot a affirmé que dès l'été 2004, Nicolas Sarkozy était au courant "de son enquête et de ses résultats". C'est le journaliste Stéphane Denis, qui se trouve être aussi un cousin du général, qui aurait été chargé de transmettre le message au ministre. "Rondot est venu me voir", confirme Denis, "il m'a demandé de dire à Sarkozy que j'avais enquêté sur l'affaire..." Rondot précise: "Quand son nom (Nicolas Sarkozy ndrl) est apparu, je me suis efforcé d'alerter tout le monde sur le fait qu'il s'agissait d'un montage. J'ai fait passer un message à Nicolas Sarkozy par l'écrivain Stéphane Denis pour le prévenir. Stéphane Denis m'a dit qu'il avait fait passer le message". "Je lui ai répété qu'on a voulu l'abattre", se rappelle le journaliste.
"Cette histoire est démente", rétorque immédiatement Nicolas Sarkozy.
Le journaliste, cette fois encore, maintient sa version. Le général aussi... Pourtant, le même le général ne semble plus revendiquer l'intégralité de la déposition qu'il a faite aux juges. Une déposition qu'il a dûment signée... "C'est vrai, aussi surprenant que cela puisse paraître, je ne savais pas que je pouvais refuser de le faire..." explique maintenant Philippe Rondot... Nous en convenons avec lui: "c'est surprenant", cette ingénuité, de la part d'un général des services secrets qui compte quarante ans de carrière à son actif.
Quant à ses interminables "notes" détaillées, le général prétend qu'elles ont été mal interprétées... Cette phrase, attribuée au Premier ministre, et notée avec diligence par le général et qui sort de la bouche de Dominique de Villepin: "Si nous apparaissons, le Président et moi nous sautons"... n'est-elle pourtant pas d'une transparence cristalline?
L'affaire Clearstream est-elle une énorme manipulation mise en place par un exécutif factieux? Le Premier ministre tente de se sauvegarder en insinuant que toute l'affaire n'est qu'une bluette inventée par des juges et des journalistes accrochés comme des moules à leur rocher...
Y a-t-il eu une manipulation dans la manipulation? Nicolas Sarkozy, qui est objectivement une des victimes de cette histoire, était-il au courant de la manip? Depuis quand? Est-il concevable que le ministre de l'Intérieur, que l'ancien locataire de Bercy, ait découvert l'histoire dans la presse? Nicolas Sarkozy a-t il voulu exploiter son rôle de "victime" afin de tirer profit du scandale?
Qui n'a pas menti dans cette histoire?
Et si ce n'est pas dans le labyrinthe informatique des comptes de Clearstream que se cachent les bénéficiaires des commissions occultes liées à l'affaire des "frégates de Taiwan"... on doit se demander d'urgence où se trouve la "lessiveuse" avec son programme de lavage d'argent sale?
"L'enquête du juge Van Ruymbeke sur la vente des frégates à Taiwan s'est constamment heurtée à l'obstacle insurmontable du secret défense. Il a été opposé à deux reprises par des ministres de gauche et de droite: Dominique Strauss-Kahn en 2001 et Francis Mer en 2002.", rappelle le Figaro du 15 mai. C'est dire si les raisons de maintenir une telle opposition doivent être tenaces...
Le juge Van Ruymbeke, faute de pouvoir enquêter plus loin, se trouvait désormais dans l'obligation de clôturer le dossier, de prononcer une sorte de non-lieu... Il n'en a même pas eu le temps. Le juge Van Ruymbeke est désormais le premier à avoir été incinéré par cette mystérieuse lessiveuse portée à incandescence. Une affaire qui commence par un marché, négocié très discrètement entre deux interlocuteurs: l'Etat français et l'Etat taiwanais...
Alain Madelin, qui est passé par le ministère de l'Industrie, affirme de son côté que le dossier contenant les noms des bénéficiaires de ces commissions occultes existe: "Il dort quelque part dans les coffres de la République des documents, signés par des ministres, qui indiquent les chiffres de ces commissions, leur pourquoi, et le nom des premiers bénéficiaires"
Si la vérité est effectivement "en sommeil artificiel" dans les coffres de la République, de deux choses l'une: ou bien on peut les ouvrir, ces coffres, ou bien il y a d'énormes soucis à se faire... quant à la République!
Posons la question qui fâche: combien de députés sont prêts, aujourd'hui, à demander la levée du secret défense sur ces documents?
Pas tous à la fois…
Sources : Amnistia net
Posté par Adriana Evangelizt