Le candidat Sarkozy et les impôts
Grosso modo, la politique de Sarko pour le Peuple de France... les riches sont exonérés d'impôts et les pauvres doivent trimer, trimer, trimer pour faire rigoler ses copains. A eux, pas de cadeaux. Vous êtes pauvres, tant pis pour vous !
Le candidat Sarkozy et les impôts
L’interview donnée au Monde par Nicolas Sarkozy (édition du 23 janvier) m’inspire quelques réactions. Le candidat de l’UMP y expose en quelques réponses l’essentiel de ses conceptions fiscales, assez ciblées comme on va le voir, et de ses principes de gestion budgétaire, plus que vagues.
La fiscalité selon N. Sarkozy
Le grand combat de Nicolas Sarkozy sera celui de l’exonération des droits de succession . Ici, son discours tente de se faire moins militant qu’à l’habitude, plus discrètement libéral : il parle maintenant d’exonérer 95 % et non plus 100 % des ménages, comme si un tel changement n’était pas dérisoire et symbolique ; il continue aussi de marteler qu’une telle mesure vise à préserver les fruits d’une vie de travail, comme si le patrimoine n’était jamais inné mais toujours durement acquis. En réalité, le principal effet (ou objectif ?) d’une telle mesure, très concrètement, est de graver dans le marbre les situations acquises, de renforcer les inégalités de richesses d’une génération à l’autre et de faire reposer sur la famille, et non sur la collectivité, la charge de la solidarité et de la redistribution.
Silvio Berlusconi en personne avait fait de cette exonération fiscale la première mesure de son gouvernement en 2001 : ces deux libéraux partagent un même goût immodéré pour les cadeaux fiscaux aux plus riches, financés par tous.
L’autre objectif-clé de N. Sarkozy est son fameux « bouclier fiscal » : cette mesure très coûteuse pour les recettes fiscales (donc pour la collectivité), déjà amorcée par l’actuel gouvernement, est un bouclier offert aux contribuables des plus hautes tranches (qui ne seront plus humiliés par cette infamie qu’est une taxation à plus de 50 % des revenus). C’est de la redistribution à l’envers (depuis ceux qui ne paient pas ou peu d’impôts vers ceux qui affichent les plus hauts revenus) ; un tel cadeau fiscal à la portion haute de la clientèle électorale du candidat n’est pas une surprise venant d’un élu de Neuilly, qui compte dans son entourage plus de millionnaires que tout autre homme politique. Pour les classes moyennes et les ménages à revenus modestes, ce bouclier aura un goût bien amer.
Enfin, la réduction de l’ISF qu’il préconise aboutirait de fait à sa quasi suppression , grâce à une nouvelle idée développée dans l’interview au Monde : la possibilité de réduire l’impôt, jusqu’à 50 000 €, si la somme en question est investie dans les PME. En pratique, cela reviendrait quasiment à exonérer d’ISF toute la première tranche (patrimoines compris entre 0,7 et 1,16 M€) et à réduire fortement les tranches suivantes. N. Sarkozy ne s’est pas embarrassé et a ici repris très exactement une proposition formulée par Laurence Parisot le week-end dernier : une nouvelle fois, faut-il s’en étonner ?
La politique budgétaire selon N. Sarkozy
Dans cette interview au Monde, Nicolas Sarkozy promet de réduire de 4 points les prélèvements obligatoires, soit une baisse de 68 milliards d’euros , alors que le coût de ses propositions a été estimé à plus de 38 milliards d’euros par l’Institut de l’Entreprise, peu suspect de tendances anti-sarkozystes (sans oublier que ce chiffrage ne porte que sur les propositions formulées avant décembre 2006). Dans le même temps, le candidat de l’UMP affirme aussi vouloir ramener la dette sous la barre des 60% car « un pays lourdement déficitaire met en danger son indépendance ». Pour tenir parole et financer ses coups de pouce fiscaux aux revenus les plus aisés, il lui faut trouver au moins 110 milliards d’euros d’économies budgétaires .
Or Nicolas Sarkozy connaît une solution miracle qu’il répète à chaque fois qu’on l’interroge (« A vous de juger » sur France 2 le 30 novembre 2006) : la suppression des organismes publics inutiles , comme le conseil monétaire de la Banque de France. Quand on sait que cet organisme comprend 7 membres on comprend à quel point les solutions miracles de Nicolas Sarkozy sont à la hauteur des enjeux. Sans doute oublie-t-il aussi que près de 300 de ces micro-organismes ont d’ailleurs été déjà supprimés par le gouvernement dont il est le numéro 2. Une telle réponse frise donc le ridicule : on attendait mieux d’un ancien ministre du budget.
L’autre solution miracle serait le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Une approche simpliste et quantitative ne saurait surprendre venant d’un candidat qui voit dans la fonction publique « un refuge pour ceux qui ont peur de prendre des risques » (discours d’investiture du 14 janvier). La promesse est non seulement simpliste, mais elle risque aussi d’être irréaliste : depuis quatre ans que N. Sarkozy et ses amis sont au pouvoir, un tel objectif n’a jamais été approché dans les faits, même de très loin. Comment les Français pourraient-ils croire que, soudainement, des non remplacements massifs seront possibles ?
En tant que ministre du budget, Nicolas Sarkozy a été l’un des gestionnaires les plus « déficitaires » de la Vème République : en deux ans seulement (1993-1995), il a réussi l’exploit de gonfler le déficit des administrations publiques de 4 à 6 % du PIB (record en la matière) et d’augmenter la dette de 45,3 à 54,6 % du PIB. Mais son vrai succès est d’être parvenu, dans le même temps, à augmenter les prélèvements obligatoires (de 42,9 à 43,6 %)…
En matière budgétaire, il ne s’était jamais montré compétent par son action ; il se montre maintenant aussi peu compétent dans ses propos. Les Français ont tout à craindre de la politique et des méthodes budgétaires de N. Sarkozy : s’il confirme ses talents passés, ils peuvent s’attendre à voir l’endettement et le déficit public exploser.
Au final, seuls les plus aisés des Français profiteront des promesses de N. Sarkozy. Quant aux autres, aux revenus modestes ou moyens, ils devront payer une facture très élevée, alourdie par une très probable mauvaise gestion à laquelle il nous a habitués et surtout par le poids des coups de pouce fiscaux aux plus riches.
C’est donc un fait, sa politique fiscale est pour le moins sélective…
Sources Betapolitique
Posté par Adriana Evangelizt