Les profits de la famine

Publié le par Adriana EVANGELIZT

Voilà un excellent article qui nous vient de La Réunion et qui explique tout à fait ce que nous disions ICI au sujet de la misère, de ceux qui la génèrent et en profitent... il est clair et net que l'Humanité doit reprendre son destin en main.



Les profits de la famine


par Y. Lemaitre



« Le secteur matières peut sauver votre capital et même le décupler ! Les cours des ressources naturelles s'envolent : profitez du plus grand boom du XXIème siècle », pouvait-on lire dans une publicité pour des placements financiers. Au moment où les révoltes contre la famine, qui ont éclaté dans plus de 30 pays pauvres, révèlent la vérité à la face du monde, les spéculations financières sur les matières premières agricoles affament des centaines de millions d'enfants, de femmes, d'hommes.

« Y a-t-il un seul parmi nous qui peut rester indifférent à la révolte de ceux qui, au Sud, ne peuvent plus manger à leur faim ? », interrogeait Sarkozy, faisant mine de découvrir les “drames” qui frappent les populations les plus pauvres, pour annoncer que la France allait doubler son aide alimentaire. Sarkozy marche dans les pas de Bush, qui a annoncé une aide de 200 millions de dollars et reprend la même compassion hypocrite. L’aide publique au développement est en chute libre, en particulier en France. Quant aux “aides” accordées par le FMI, ce sont des prêts, un moyen de pression pour ouvrir le marché agricole au “libre-échange”, c’est-à-dire à la rapacité de l’agroalimentaire.

L’hypocrisie est totale. Les dirigeants du monde prétendent lutter contre la pauvreté. Ils parlent de solidarité et de souveraineté alimentaire alors que leur politique est soumise aux intérêts des multinationales de l’agroalimentaire. À coups de subventions à l’exportation ou d’accords de libre-échange, leur action a ruiné la grande masse des petits paysans, transformés en un nouveau prolétariat qui n’a plus rien pour vivre que de tenter de vendre sa force de travail sur le marché mondial. Ils se retrouvent dans les bidonvilles des capitales surpeuplées des pays pauvres. Parfois, ils réussissent à fuir la misère pour aller tenter de vendre leur force de travail dans les pays riches, au risque de leur vie, au prix du mépris et de l’humiliation.

Cette politique a accentué, généralisé les pratiques inaugurées par le colonialisme, supprimant les cultures vivrières destinées à la population locale pour condamner l’agriculture à fournir des produits pour les pays riches : gaspillage criminel. Le comble en est le développement de l’industrialisation des agrocarburants. On brûle du maïs ou du blé pour remplir le réservoir des voitures, pendant que des êtres humains crèvent de faim, véritable crime contre l’humanité, pour reprendre l’expression de Jean Ziegler.

Face à « l’urgence, lutte contre la pauvreté et lutte contre le changement climatique doivent se renforcer l’une l’autre », dit Nicolas Sarkozy. Certes, mais cette urgence est incompatible avec la logique d’un système qui entraîne le monde dans une catastrophe.

Le blé, le riz, le soja, le maïs sont des marchandises, objets de spéculation sur le marché mondial. On ne produit pas pour nourrir les hommes, mais pour faire des profits. Si, par exemple, le prix du riz s’est envolé de 75% en deux mois, et si celui du blé a grimpé de 120%, c’est parce qu’à la Bourse de Chicago, pour se refaire après la crise immobilière américaine, les traders se sont reportés sur les matières premières, en particulier agricoles. Les grandes sociétés spéculent, organisent le stockage, sans même investir pour la production.

La mondialisation financière et impérialiste a emporté le monde dans une course folle à la spéculation organisée au bénéfice d’une classe minoritaire et parasite qui, de crise sectorielle en crise sectorielle, conduit, à plus ou moins brève échéance, à une crise globalisée. La crise des crédits hypothécaires aux États-Unis a ouvert une folle fuite en avant dans laquelle les capitalistes se livrent un combat acharné pour compenser leurs pertes, ruiner leurs concurrents ou investir dans de nouvelles opérations financières à hauts risques. Les prix s’emballent au détriment de l’ensemble des classes populaires, recul général dont la crise alimentaire est l’aspect le plus dramatique. De la crise du crédit, on est passé à la crise bancaire, puis à l’emballement des prix, l’inflation, qui entraîne une chute de la consommation à l’échelle mondiale. La récession qui a débuté aux États-Unis pourrait bien ainsi se généraliser à l’ensemble de l’économie mondiale, provoquant en retour une débâcle financière ?

Cet engrenage ne peut être arrêté que par l’intervention des peuples, la révolte comme les émeutes de la faim des prolétaires des pays pauvres. Dimanche 20 avril, le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, lors de la conférence sur le commerce et le développement, à Accra, au Ghana, concluait : « Si cette crise n’est pas correctement gérée, elle pourrait déclencher une avalanche d’autres crises [...] et devenir un problème complexe affectant la croissance économique, le progrès social et même la sécurité politique dans le monde entier. » Les bourgeois sont inquiets, ils craignent pour l'avenir des affaires, la stabilité politique, la défense de leurs privilèges. Il n’y a que cette peur qui peut les contraindre à freiner, s’ils le peuvent encore, la terrible logique qui est en marche et qui ne pourra être réellement enrayée que si les prolétaires du monde entier imposent leur contrôle sur l'économie et la société.

Sources Témoignages 

Posté par Adriana Evangelizt  

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