Régression euro-méditerranéenne

Publié le par Adriana EVANGELIZT

Eh oui... un aveugle y verrait...


Régression euro-méditerranéenne



par Bernard Dréano




Selon Bernard Dréano, l’Union euro-méditerranéenne vue par Nicolas Sarkozy est un projet sécuritaire qui alimente l’idéologie de guerre des civilisations et couvre les despotismes.

Nicolas Sarkozy a développé son projet d’Union méditerranéenne à Tanger le 23 octobre 2007. Il l’avait sorti de son chapeau à Toulon le 7 février, quand il était candidat à l’élection présidentielle, avec dans l’idée de barrer la route de l’Union européenne à la Turquie en lui proposant de devenir plutôt le « pivot » de cette Union méditerranéenne. Ce n’est pas seulement une entourloupe pour proposer aux Turcs un partenariat « privilégié » avec l’Europe (ils en disposent déjà depuis... 1963 !), mais bien une orientation stratégique.

L’Union de « tous les Méditerranéens », Sarkozy l’a présentée, au Maroc, à ceux « qui n’arrivent pas à sortir des cycles infernaux de la vengeance et de la haine [...], qui ne voient partout que la guerre de tous contre tous, qui sont pétris de tolérance et d’humanisme et qui se désespèrent de ne rencontrer que l’intolérance et l’intégrisme ». L’intégrisme visé n’étant pas celui de l’Opus Dei ou des colons religieux israéliens, la France (et la rive Nord) offre donc de voler au secours de la rive Sud (Arabe), menacée par l’islamisme. Comme dit Sarkozy, il s’agit de choisir si « oui ou non les civilisations et les religions se feront la guerre, le Nord et le Sud vont s’affronter, le terrorisme, l’intégrisme, le fondamentalisme vont s’imposer ou non au monde ».

Pour cela, a-t-on expliqué à la conférence ministérielle euro-méditerranéenne de Lisbonne le 6 novembre, il faut une « union de projets » (sur la culture, la santé, l’environnement, etc., et bien sûr contre le terrorisme). Mais surtout pas le processus Euromed lancé à Barcelone en 1995, où les États du pourtour méditerranéen s’étaient donné pour but de construire une région « qui garantisse la paix, la stabilité et la prospérité, exige le renforcement de la démocratie et le respect des droits de l’homme, un développement économique et social durable et équilibré, la lutte contre la pauvreté et la promotion d’une meilleure compréhension entre les cultures ».

Ce processus, lancé explicitement dans le contexte du processus de paix israélo-palestinien, s’est ensuite bloqué. La paix a disparu de l’agenda, avec la poursuite de la colonisation de la Palestine puis l’idéologie de guerre des civilisations, nourrie par les États-Unis comme par les islamistes radicaux. La sécurité, c’est celle du Nord et de la guerre aux immigrés, et la lutte contre le terrorisme a servi de prétexte à l’enterrement des droits et au maintien des despotismes. Pourtant, l’esprit de Barcelone n’est pas mort. Les accords « Euromed » entre l’Union européenne et les pays de la rive Sud prévoient le respect des droits de l’homme, et les Israéliens, Moubarak en Égypte ou Ben Ali en Tunisie n’ont guère apprécié que les ONG du Nord et du Sud, et parfois le Parlement européen, rappellent les États à leurs devoirs.

L’« Union » sarkozienne a pour objet de faire disparaître de si « désagréables » rappels. On n’y parle plus de droits de l’homme, ni de rôle des sociétés civiles. Il n’y a plus de contrôle du Parlement européen sur des « unions de projets » bilatéraux. La sécurité commune est devenue la lutte contre le terrorisme et l’immigration clandestine. Le partenariat est fondé sur l’inégalité. « L’audace » prônée par Sarkozy a été applaudie par Ben Ali et Kadhafi.

Bernard Dréano est président du Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale (Cedetim).

Sources Politis

Posté par Adriana Evangelizt

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