Villepin, un amoureux des coups tordus

Publié le par Adriana EVANGELIZT

Villepin, un amoureux des coups tordus

par Eric AESCHIMANN


Secrétaire général de l'Elysée, il montait des dossiers avec l'aide d'un «cabinet noir».

En 2002, Dominique de Villepin rêvait du ministère de l'Intérieur. Il voulait connaître les dossiers et disposer des moyens de l'Etat pour connaître les secrets de ses adversaires. Parce qu'il s'est fait connaître avec son discours à l'ONU, on le dit flamboyant, épris d'envolées lyriques et de combats vertueux. Erreur : cet homme-là a une âme de flic. Depuis son arrivée dans l'entourage de Jacques Chirac, il a toujours aimé les coups tordus, les manipulations. Avant la présidentielle de 1995, il était déjà à la manoeuvre dans la grande bataille contre les balladuriens. Nommé secrétaire général de l'Elysée, il y exerce quasiment à plein-temps l'art d'envoyer les missiles. A son tableau de chasse, Lionel Jospin reste son plus beau trophée.

Faire diversion. Novembre 1999, à l'Assemblée nationale. Interpellé par le député RPR Patrick Ollier sur son implication éventuelle dans l'affaire de la Mnef, la mutuelle étudiante, le Premier ministre socialiste répond : «Il paraît que vous êtes quelques-uns à faire lire vos questions avant de les prononcer ici afin, j'imagine, de vous assurer de leur parfaite correction grammaticale.» En quelques mots, Jospin vient de donner corps à un bruit qui court le tout-Paris politique : oui, Dominique de Villepin a effectivement pris l'habitude d'envoyer des députés RPR au front. A l'Elysée, il a installé autour de lui une «cellule judiciaire» chargée de trouver les meilleures parades aux attaques de la justice contre le chef de l'Etat. Et, en temps de cohabitation, cette cellule est capable de se changer en «cabinet noir», pour monter des dossiers, diffuser des informations, alimenter les parlementaires amis. Faire diversion.

Pendant cinq ans, le cabinet noir n'a pas chômé. Un jour c'est la Mnef. Un autre le prétendu emploi fictif dont Lionel Jospin aurait bénéficié au Quai d'Orsay entre 1993 et 1995, justement quand Dominique de Villepin était directeur de cabinet du ministre des Affaires étrangères d'alors, Alain Juppé. Il était donc mieux placé que quiconque pour savoir qu'Alain Juppé en personne avait refusé au dirigeant socialiste une affectation. A l'époque, le PS a aussi soupçonné Villepin d'avoir téléguidé le dépôt d'une plainte par une habitante de l'île de Ré, militante RPR, contre les conditions d'achat de la maison de Lionel Jospin. Une plainte qui finira classée sans suite. Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose.

Boniment. Son arrivée au Quai d'Orsay ne l'a pas fait changer. En juillet 2003, il dépêche au Brésil un avion militaire supposé ramener Ingrid Betancourt, l'otage française retenue en Colombie par les Farc. Il omet de prévenir... le Brésil et la Colombie. Même pour son accession à Matignon, il n'a pas hésité à monter un boniment, pour achever de convaincre Jacques Chirac de le nommer. L'affaire se passe le dimanche 29 mai 2005, jour du référendum sur la Constitution européenne. La France vote et le résultat est couru d'avance : ce sera non. Villepin joue de sa fonction de ministre de l'Intérieur pour faire croire au chef de l'Etat que l'annonce du résultat pourrait bien être suivie de manifestations spontanées. Pour donner du crédit à l'histoire, il fait fermer par la police des boutiques ouvertes le dimanche dans le quartier de l'Elysée. Deux jours plus tard, il est nommé Premier ministre.

Sources : LIBERATION

Posté par Adriana Evangelizt

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