Villepin poussé à la générosité

Publié le par Adriana EVANGELIZT

Villepin poussé à la générosité
Par Renaud DELY, François WENZ-DUMAS
 

A l'approche des élections, le Premier ministre concède des aides ciblées.

Proverbe gouvernemental : lorsque le front de l'emploi connaît une embellie, le porte-monnaie des ménages frémit. En cette rentrée, la baisse du chômage enregistrée depuis près d'un an a peu à peu déplacé le front des revendications syndicales et des attentes de la population sur un autre terrain : celui du pouvoir d'achat. Et, à l'amorce de la campagne élyséenne, la majorité, comme l'opposition, ne manque pas d'y attacher la plus grande attention.
Emprunts. C'est pour tenter d'éteindre les braises de ce feu couvant que Dominique de Villepin a annoncé hier soir sur TF1 qu'allait se tenir, «d'ici la fin 2006», une «conférence sur l'emploi et les revenus» . Comme par hasard, le principe d'une conférence sur l'emploi figure dans le programme socialiste. Elle sera préparée par un rapport du Cerc (Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts), un organisme, a rappelé le Premier ministre, «présidé par Jacques Delors» . Par ailleurs père de Martine Aubry, coauteure du programme socialiste.
Autre emprunt à la gauche, la prime pour l'emploi (PPE), créée en 2001 par Laurent Fabius, «sera pratiquement doublée pour ceux qui gagnent le Smic», a précisé Villepin. «C'est l'équivalent d'un treizième mois», a-t-il souligné. Pour défendre le pouvoir d'achat, le chef du gouvernement n'hésiterait donc pas à puiser dans les recettes de la gauche. D'ailleurs, a-t-il rappelé, l'objectif d'un Smic à 1 500 euros à la fin de la prochaine législature, défendu par Laurent Fabius, devrait être atteint.
En attendant, Villepin a confirmé le lancement d'un chèque transport, proposé à tous les salariés qui le souhaitent, sur le modèle du ticket-restaurant. Quant à l'allocation de rentrée pour les étudiants, son montant est fixé à 300 euros.
Humeurs. Dimanche à La Rochelle, François Hollande avait qualifié ces premières décisions de «mesurettes [...] qui sont au pouvoir d'achat ce que les Apéricubes sont à la gastronomie» . Le menu dévoilé hier soir par le Premier ministre suffira-t-il à rassasier les consommateurs-électeurs ? Tout en cherchant à les apaiser, Villepin s'efforce, aussi, pour une fois, de tenir compte des humeurs de sa majorité. Et du débat naissant en son sein sur le pouvoir d'achat.
Soucieux de ne pas désespérer l'électeur à l'approche de la présidentielle, certains proches de Nicolas Sarkozy prennent leurs aises avec leurs dogmes libéraux pour réclamer depuis quelques jours que le gouvernement lâche du lest, notamment à travers l'outil de la PPE. C'est le cas de Pierre Méhaignerie (lire ci-contre). Leur message se heurte à l'ascèse budgétaire prônée par tous ceux qui, à droite, souhaitent affecter la totalité des plus-values fiscales inattendues de cette année (3 milliards d'euros) au désendettement de l'Etat.
Si l'état des finances publiques peut la justifier, cette rigueur peut toutefois être désastreuse d'un point de vue politique. Lionel Jospin a payé pour le savoir. A l'automne 2000, sur fond de croissance soutenue et de fort recul du chômage, son gouvernement avait été plombé par l'addition de la hausse de certains tarifs liés à la vie quotidienne, comme le prix de l'essence, et du pernicieux débat lancé par Jacques Chirac sur la fameuse «cagnotte», ces plus-values fiscales que le gouvernement était accusé de garder par-devers lui. Toutes proportions gardées (le chômage baisse moins vite, la croissance est moins élevée, la «cagnotte» est plus modeste), Dominique de Villepin sait qu'une conjoncture peu ou prou similaire menace de ternir sa rentrée.
Fusion à risque. D'autant qu'un autre écueil pèse à terme sur le pouvoir d'achat des ménages : la fusion de Gaz de France et de Suez, dont le projet de loi sera examiné en session extraordinaire à l'Assemblée à compter du 7 septembre. Les risques de hausse des tarifs engendrés par cette privatisation continuent d'inquiéter une bonne frange des députés UMP. «La recherche légitime de la nouvelle entreprise privée serait celle de la profitabilité maximum, des bénéfices les plus larges. [...] Bien évidemment, cela conduit à l'augmentation des tarifs pour les consommateurs», déclarait, hier sur France Inter, le sarkozyste Dominique Paillé, député UMP des Deux-Sèvres. Sa décision est prise : il votera contre ce texte.
Sources : Libération

Posté par Adriana Evangelizt

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