Villepin fera d'autres réformes
"Villepin fera d'autres réformes et on sera derrière lui"
par Prune PERROMAT
Gueule de bois à l'UMP. Quelques jours après le retrait du CPE, «Libération» est allé à la rencontre des militants du parti – élus ou simples encartés – en Seine-Saint-Denis. Ils parlent de leur colère «contre la rue», de leur désir de se remobiliser. Et si certains admettent l'échec du gouvernement, tous affirment soutenir le Premier ministre.
«Ce n'est pas la fin du monde.» Au cœur de terres de gauche, en Seine-Saint-Denis, quelques militants UMP réunis jeudi après la tourmente du Contrat première embauche tentent de minimiser son impact sur la droite et sur le gouvernement. «C'est un coup dur, c'est vrai, mais on a vu que la droite était elle aussi capable de proposer des mesures pour les jeunes.» Plutôt que d'entêtement, ils préfèrent parler d'audace: «Il faut être sacrément courageux pour entamer des réformes un an avant la présidentielle.»
Pour ces militants qui se décrivent eux-mêmes comme «des durs de l'UMP», habitués à la contradiction permanente avec leurs voisins communistes ou socialistes, rien n'est perdu. «Pour le moment, le mouvement des réformes est ralenti, mais il va en faire d'autres Villepin, et on sera derrière lui», se persuadent-ils.
Foi aveugle ou discours de façade, ils sont peu à reconnaître les erreurs du gouvernement dans l'échec du CPE: «Tout ça, c'est la faute de la gauche et des syndicats qui ont monté en épingle les réactions épidermiques de ceux qui ne peuvent accepter que la droite ait, elle aussi, des propositions sociales.» Si le CPE venait de l'autre bord, il aurait certainement bénéficié d'un handicap en moins dès le départ, se rassurent-ils. Faute de quoi, «c'est une véritable machine anti-CPE qui s'est mise en marche».
Le gouvernement n'aurait pas dû céder
Si tous souhaitent afficher un soutien sans faille au gouvernement, beaucoup déplorent dans la tournure des événements une certaine faiblesse de sa part. Pour Jacques Despert, conseiller municipal à Raincy, ville du député-maire (UMP) Eric Raoult, «le gouvernement n'aurait pas dû céder. Une fois de plus, c'est la rue qui commande». Une critique reprise par Salvatore Fichera, commerçant de 54 ans au Raincy, qui s'élève avec véhémence «contre la légitimité de la rue pour décider des lois (...). Il faut que les propositions de loi se discutent à l'Assemblée. La rue ne doit pas prendre le pas sur la démocratie.»
Encore échaudés par la crise des banlieues qui avait éclaté dans la ville voisine de Clichy-sous-Bois, ces défenseurs du gouvernement craignent ce que leur député nomme «la quartier academy» ou «l'impression que les jeunes ont depuis peu intégré le fait que, pour se faire entendre, il faut faire du spectaculaire, il faut casser. Bref, il faut mettre le son très fort».
Quelques-uns, comme Fabien Schaller, responsable des Jeunes populaires du département, osent la lucidité: «Il faut dire les mots. Le CPE, c'est un échec, c'est vrai.» Un nouvel adhérent, Soulé Abdereman de Rosny-Sous-Bois, est du même avis: «Que le CPE soit finalement enterré, c'est une très bonne chose. Son lancement n'a pas été accompagné d'une explication de grande ampleur comme cela le demandait. A la fin, tout le monde était perdu.» Les 50 000 tracts distribués dans le département ne pèsent pas lourd à côté des millions de papillons propagés par la mobilisation anti-CPE dans le pays, ils en conviennent. Mais «pas la peine de faire du CPE le dernier canot du Titanic», tempère Fayçal Menia, 42 ans, directeur d'un collège privé d'Aubervilliers. «On s'est trompé, on n'a pas su expliquer et on revient en arrière, c'est tout.»
Sauver le soldat Villepin
A l'heure de la défaite, les fidèles prétendent ne pas vouloir baisser les bras. «Il faut une remobilisation des troupes», appelle Jean-Pierre Renard, chef d'entreprise à Peyrefitte. Rien de tel qu'une bonne épreuve: «Ça resserre les gars, ça resserre les coudes.» Aujourd'hui, ils se sentent investis d'une nouvelle mission, aider le Premier ministre à tenir: «Villepin, il faut absolument qu'il dure jusqu'à 2007, sinon on est foutu.» Et puis la crise a apporté avec elle de nouvelles préoccupations: «On a perdu les plus déterminés qui vont aller plus loin vers la droite.» Après Sarkozy, Villiers, puis Le Pen. «On est très inquiets. L'extrême droite risque de saisir la balle au bond et d'attirer vers elle les déçus UMP après le recul du gouvernement.»
Sources : LIBERATION
Posté par Adriana Evangelizt