Villepin fait front et exclut toute démission
Dominique de Villepin, plongé dans la tourmente Clearstream, a fait front jeudi lors de sa 10ème conférence de presse mensuelle, répétant crânement n'avoir jamais demandé d'enquête sur des hommes politiques et excluant toute idée de démission.
Livrant au passage une leçon de déontologie aux journalistes, le Premier ministre a démenti une nouvelle fois, face à une salle comble, avoir reçu des "instructions" de Jacques Chirac, mais a subtilement infléchi sa version des faits concernant Nicolas Sarkozy.
Alors qu'il affirmait mardi que le nom de son rival n'avait "à aucun moment" été "évoqué" lors de la réunion du 9 janvier 2004, au coeur de l'affaire, il a indiqué cette fois que M. Sarkozy n'a "pas été évoqué en liaison avec de quelconques affaires" mais "en tant que ministre de l'Intérieur".
Dans cette affaire, la justice enquête sur les "dénonciations calomnieuses" d'un "corbeau" ayant faussement accusé au printemps 2004 des personnalités du monde politique et économique - dont M. Sarkozy - d'avoir des comptes occultes à l'étranger via la société financière Clearstream.
M. de Villepin avait choisi d'éviter ce "dossier particulier" dans sa déclaration préliminaire pour se consacrer aux chantiers gouvernementaux en cours. Peine perdue, la grande majorité des questions a porté sur l'affaire.
Le chef du gouvernement s'est employé à se distancier de la version des faits avancée par le général Philippe Rondot, spécialiste du renseignement qu'il avait chargé d'enquêter sur la véracité de listings de comptes liés à Clearstream et dont le Monde a publié mercredi les notes et le procès-verbal d'audition.
Il a d'ailleurs assuré avoir "souvent eu l'occasion d'évoquer tout cela" avec le ministre de l'Intérieur lui-même, de la façon "la plus franche et la plus claire", expliquant ne pas lui avoir transmis, dès janvier 2004, les informations le concernant car il voulait d'abord "établir la crédibilité et la vraisemblance des faits", dans le seul souci de "la sécurité de la France" et de ses "intérêts diplomatiques".
Il a insisté sur la différence de contextes entre 2004 et 2006, notant que "dans chaque année qui précède une élection présidentielle, il y a malheureusement un certain nombre d'affaires qui arrivent opportunément, entre guillemets, sur la place publique".
"Je souhaite qu'on ne plaque pas un certain nombre de raisonnements d'aujourd'hui (...) sur ce qu'était la période d'alors", "qu'on n'imagine pas un certain nombre de rivalités d'aujourd'hui qui sont parfois très largement artificielles et montées", a-t-il avancé, une allusion claire à ses relations avec M. Sarkozy.
Il a pointé aussi un "risque d'instrumentalisation", tout en soulignant qu'il n'est pas de ceux qui "lisent l'histoire" en y voyant "des complots".
Le chef du gouvernement a de nouveau exclu toute idée de démission, affirmant qu'il trouvait "normal de rendre des comptes" comme "n'importe quel citoyen", mais que cela ne le détournait "à aucun moment" de sa mission. Il a promis de "rester mobilisé sans relâche" au service des Français.
Mais il a profité de l'exercice pour renvoyer la presse à son code de déontologie tout en se défendant de mettre "quiconque en cause".
Reprenant un journaliste l'interrogeant sur sa "défense", M. de Villepin l'a interrompu, pour lui demander d'utiliser les mots "avec précaution".
"Je ne me défends pas, je vous dis la vérité de ce que j'ai vécu", a-t-il corrigé. "Je vous le redis, quand on est journaliste, on a aussi un code de déontologie à appliquer, on a aussi des scrupules à avoir".
Sources : AFP
Posté par Adriana Evangelizt