D'où Gergorin tenait-il les listings ?

Publié le par Adriana EVANGELIZT

Un excellent interview de Monsieur Chevènement qui ne nous semble point un plaisantin et qui demande "D'où M. Gergorin tenait-il les listings ?" Pourquoi n'est-il pas encore devant le juge ? Enfin, on convoque tout le monde sauf lui, ce qui est tout de même un comble...

Clearstream Jean-Pierre Chevènement, accusé à tort, dénonce la lecture exclusivement politique de l'affaire :

"D'où M. Gergorin tenait-il les listings ?"

par Renaud DELY


Le nom de Jean-Pierre Chevènement, président d'honneur du Mouvement républicain et citoyen (MRC), apparaît sur les listings truqués de Clearstream parmi les politiques accusés, à tort, de détenir des comptes à l'étranger. Il sera entendu lundi prochain par la justice.

Qu'allez-vous dire au juge ?

Je me suis constitué partie civile pour comprendre cette affaire, qui reste pour moi mystérieuse. Je m'étonne qu'on ne s'intéresse pas davantage à sa genèse. La rivalité exacerbée en 2002-2003 entre monsieur Camus, qui dirigeait EADS, et monsieur Forgeard, qui lui a succédé, était de notoriété publique. Monsieur Delmas, adjoint de monsieur Forgeard, à l'époque président d'Airbus, paraît être l'une des cibles du corbeau. Or c'est monsieur Gergorin, adjoint de monsieur Camus, qui remet à deux reprises en novembre 2003 et le 9 janvier 2004 des listings truqués au général Rondot et à Dominique de Villepin. Il y a anguille sous roche ! Les médias ne s'intéressent qu'aux rapports entre messieurs Chirac, Sarkozy et de Villepin. Certes, c'est intéressant, bien que ce ne soit pas un sujet nouveau. Mais d'où monsieur Jean-Louis Gergorin tenait-il les listings truqués ? Il semble d'ailleurs que ce ne soient pas tout à fait les mêmes. Des noms qui figurent selon le général Rondot dans celui de novembre 2003 (Laurent Fabius, Michel Rocard) disparaissent. D'autres apparaîtront ensuite, dont le mien, dans le listing qu'un corbeau fait parvenir au juge Van Ruymbeke en avril 2004. Et nul ne semble plus se soucier de l'identité du ou des corbeaux.

Vous avez une piste ?

Il y a de fortes présomptions qui mériteraient d'être creusées. Pour cela, il me semble souhaitable que l'on étende l'information judiciaire à des poursuites pour «faux et usage de faux». Il serait utile de revenir aux origines. Pourquoi M. Gergorin n'est-il pas entendu par la justice ? Il paraît qu'il ne souhaite s'exprimer que devant le juge, mais aucun ne l'a semble-t-il convoqué à ce jour. Hélas, tout cela n'intéresse pas beaucoup les médias.

Pourquoi, selon vous ?

L'étroite liaison entre l'industrie d'armement et une bonne partie de la presse y est peut-être pour quelque chose. Par ailleurs, des moeurs répréhensibles se sont développées au sein de l'industrie d'armement. On n'hésite plus à recourir à des officines extérieures pour déstabiliser un concurrent. Des pratiques malsaines se multiplient au sein d'entreprises vivant largement de commandes d'Etat ! Je pense par exemple à l'affaire Thomson-Lagardère dans les années 90 ou à la garde à vue de M. Delmas il y a deux ans. L'origine des listings truqués est plus digne d'intérêt que de savoir si, à l'occasion du 8 mai, madame Alliot-Marie salue plus chaleureusement M. de Villepin ou M. Sarkozy.

Qui peut vous en vouloir au point d'avoir glissé votre nom dans ce fameux listing ?

Je ne suis pas d'un tempérament paranoïaque. Les gens qui l'ont fait ne me voulaient certainement pas que du bien. Mon indépendance fait de moi un gêneur. Certains peuvent avoir intérêt à m'éliminer de la vie politique. Mais peut-être mon nom a-t-il été utilisé comme un leurre ? Peut-être ai-je reçu ce que l'on appelle une «balle perdue» ?

A vos yeux, les politiques ne sont que des victimes collatérales ?

Nous sommes vraisemblablement en présence d'une manipulation qui s'est greffée sur des règlements de compte qui, eux, n'étaient pas politiques. Il n'est pas agréable pour un homme politique de voir son nom jeté en pâture à l'opinion publique à la suite d'une dénonciation émanant d'un corbeau. Cela discrédite un peu plus la démocratie. Le problème, c'est que le secret de l'instruction n'existe plus. Le temps de la justice est un temps long, celui des médias est un temps court : la loi du pilori règne ! Retour au Moyen Age...

Qu'est-ce que cela révèle de l'état de nos institutions ?

D'abord, la pénétration des intérêts privés dans l'Etat, le mépris de l'intérêt public et de la démocratie. Et la façon dont le système d'information répercute les choses n'aide pas à comprendre. Des bulles médiatiques se succèdent. Y a-t-il eu, par exemple, un vrai débat organisé depuis le 29 mai 2005 sur les réponses à donner à la victoire du non au référendum pour redresser la construction européenne ? Le commentaire des sondages a remplacé les débats de fond. Nous vivons dans le virtuel, qui est l'ennemi de la démocratie. Je demande le retour aux faits !

Sources : LIBERATION

Posté par Adriana Evangelizt

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