Nicolas Sarkozy donne déjà le tournis
Nicolas Sarkozy donne déjà le tournis
par Sylvain Besson
Le nouvel élu, qui prend ses fonctions aujourd'hui, a déjà imposé sa méthode. Il surprend ses amis comme ses ennemis.
Il n'est pas encore président qu'il donne déjà le tournis à ses amis comme à ses adversaires. En ouvrant son futur gouvernement à des personnalités de gauche et du centre, puis en annonçant une vaste refonte des ministères et des administrations françaises, Nicolas Sarkozy a provoqué une sorte de séisme politique. A tel point que certains à droite ont du mal à suivre et se posent ouvertement la question: «Est-ce qu'on va tenir longtemps à ce rythme-là?»
Le nouvel élu doit prendre ses fonctions ce mercredi, à l'issue d'une cérémonie à l'Elysée. A en juger par l'activité déployée ces derniers jours, il devrait vite imposer son style au sommet de l'Etat: communication permanente, pouvoir concentré entre ses mains, approche managériale centrée sur la performance plus que sur l'amitié. Mais qu'on se rassure: la rouerie politicienne, façon Jacques Chirac, fera partie intégrante du nouveau régime.
«Big-bang»
«Avec Sarkozy à l'Elysée, on aura une communication très forte, prévient le politologue Dominique Reynié. Ce sera une surcommunication, faite par des professionnels, avec des formules et des images destinées à frapper l'opinion.» Exemples récents: Nicolas Sarkozy recevant ses futurs ministres durant le week-end, en chemise, comme un patron de start-up. Ou encore ce titre du Figaro prédisant un «big-bang» dans la haute administration, avec des regroupements et des suppressions de ministères.
Il y a une part de trompe-l'œil dans ces annonces. Nicolas Sarkozy se targue de créer une direction compacte, avec seulement 15 ministres? En fait, la plupart des gouvernements récents n'en comptaient guère plus, mais ils étaient flanqués d'une myriade de ministres délégués (aux Anciens combattants, à la Jeunesse et aux sports...). Il suffit de les rebaptiser secrétaires d'Etat pour donner une impression d'allégement.
L'autre caractéristique du style Sarkozy, c'est d'être personnel et basé sur l'instinct. Les offres qu'il a faites à des figures de gauche - Bernard Kouchner pourrait hériter des Affaires étrangères, Hubert Védrine d'une autre fonction - constituent une surprise, surtout après une campagne menée très à droite. Les «sarkozystes» historiques, dont certains risquent d'être privés de ministères, s'en accommodent tant bien que mal: «Nicolas Sarkozy n'a jamais promis un poste à qui que ce soit», a expliqué mardi son fidèle lieutenant Brice Hortefeux. Lui-même dit qu'il se pliera sans broncher aux désirs du président élu: «J'ai toujours eu la même ligne de conduite depuis des années et des décennies que je le connais: sa décision sera la bonne.»
«Laisser faire le patron»
Ce discours est aujourd'hui relayé à tous les étages du nouveau pouvoir: il faut «laisser faire le patron». Durant la campagne présidentielle, ses initiatives individuelles, comme le lien fait entre «identité nationale» et immigration, ont été couronnées de succès. Il n'y a pas de raison qu'il en aille autrement à l'approche des élections législatives de juin.
Car c'est avec cette échéance à l'esprit que Nicolas Sarkozy mène son opération de séduction à gauche et au centre. Selon Dominique Reynié, son but est de perturber et de démobiliser ses adversaires, qu'ils soient socialistes ou partisans de François Bayrou. En faisant preuve d'esprit d'ouverture, il désamorce le principal argument de l'opposition, qui espérait jouer sur la peur d'un président sectaire et omnipotent.
Les socialistes n'apprécient pas: mardi, leur numéro un François Hollande a accusé Nicolas Sarkozy d'utiliser «le débauchage, la trahison» dans le seul but d'«avoir les mains libres». Et l'ancienne ministre Elisabeth Guigou a condamné une «manœuvre qui vise purement et simplement à laminer la gauche».
Sources Le Temps
Posté par Adriana Evangelizt