Pour défendre leurs retraites, les cheminots paralysent la France
Pour défendre leurs retraites, les cheminots paralysent la France
par Mathieu Van Berchem
« C’est le ministre du Travail Xavier Bertrand qui l’affirme: aujourd’hui, il n’y aura «quasiment pas de train, de bus ou de métro ».
Le régime spécial, qui permet aujourd'hui de cotiser 37 ans et demi au lieu de 40, est menacé par une réforme.
Ça devait arriver un jour ou l'autre. Après cinq mois passés à l'Elysée et malgré sa forte ambition réformatrice, Nicolas Sarkozy n'avait pas encore subi l'épreuve de la grève. La voilà, «carrée» comme on dit dans le jargon social, c'est-à-dire limitée pour l'instant à un jour, et massive. Pour la première fois depuis le fameux mois de décembre 1995, tous les syndicats de la SNCF soutiennent le mouvement.
En nombre, les grévistes ne représentent pas une part considérable de la population française. Ceux qui font grève aujourd'hui se battent pour sauver ces fameux régimes spéciaux que le gouvernement entend réformer: au lieu de 37 ans et demi, ils devront cotiser 40 ans avant d'avoir droit à la retraite. 500 000 actifs sont concernés, une minorité donc, mais au pouvoir de nuisance redoutable. En 1995, ce sont les cheminots qui, en grève pendant des semaines, avaient paralysé le pays et obligé Alain Juppé à retirer ses plans de réforme de la sécurité sociale et... des retraites.
D'où l'extrême prudence du président Sarkozy. Depuis son arrivée à l'Elysée, il n'a que des mots tendres pour les syndicats et leurs chefs, qu'il invite régulièrement à dîner dans son pavillon versaillais de la Lanterne. «Il faut se parler, je comprends leurs inquiétudes, répète Sarkozy. Ils font grève, c'est leur droit. Ils doivent comprendre qu'on doit moderniser le pays.» Pas un mot plus haut que l'autre: le chef de l'Etat veut éviter les erreurs de Juppé et de Dominique de Villepin, ces «réformateurs» patentés qui avaient péché par manque de diplomatie. Quand, le mois dernier, le premier ministre François Fillon fait rouler tambour pour annoncer la «fin» des régimes spéciaux, le président lui fait passer un très mauvais quart d'heure. Quoi qu'on pense de ces régimes, «un peu de méthode ne nuit pas à la résolution des problèmes».
L'opinion est mûre, insiste le président. Cette réforme est «équitable», elle place les cheminots, mais aussi les électriciens ou les gaziers, au même «tarif» que les autres fonctionnaires. Les sondages sont plutôt rassurants. Enfin, tout dépend où l'on sonde. Pour le Figaro, qui publie une enquête BVA, une majorité de Français (57%) estime que la grève n'est pas justifiée. Le quotidien communiste L'Humanité obtient des résultats inverses: 54% des sondés soutiennent le mouvement (institut CSA). Faiblesse des chiffres, hasard des échantillons, sans doute. La gauche elle-même est divisée. Si les proches de Laurent Fabius prônent une opposition frontale, d'autres socialistes, parmi lesquels Manuel Valls ou Arnaud Montebourg, justifient «l'alignement» des retraites au nom de «l'équité».
La durée du mouvement dépendra de la mobilisation d'aujourd'hui. Au contraire de Force ouvrière et de Sud-Rail notamment, qui appellent à une grève illimitée, la CGT s'en tient, pour l'heure, à un simple arrêt de travail. Mais l'organisation prévient: «Si rien ne bouge après jeudi, nous prendrons les dispositions utiles pour prolonger le mouvement.»
Sans trains ni bus ni métro
C’est le ministre du Travail, Xavier Bertrand, qui l’affirme. Aujourd’hui, il n’y aura «quasiment pas de trains, de bus ou de métro».
Au moins, c’est clair. LA SNCF recommande à ses clients de «différer leurs déplacements jusqu’à vendredi soir».
EN FRANCE, 46?TGV circuleront, sur 700. Sur le réseau international, 80% des Eurostar (Londres) et 60% des Thalys (Bruxelles) seront au départ.
POUR LA SUISSE, cela donne: aucun train entre Paris et Lausanne, seulement un train en partance de Genève (7 h 51) et un Paris-Genève (14 h 38), sous réserve de changement bien sûr (www.sncf.com).
LA NOUVELLE LOI sur le service minimum n’est pas encore entrée en vigueur (d’ailleurs elle ne résoudra pas tous les problèmes des usagers). Les citadins devront donc faire preuve de patience, à Paris, où le métro sera «très fortement perturbé», mais aussi à Lyon et dans d’autres grandes villes. Côté avions, les perturbations sont «possibles» à Orly, faibles à Roissy (www.air-france.fr).
UN SEUL PRESTATEUR de services se frotte les mains: JC Decaux, qui fournit les «vélib» (location de vélos) à Paris et à Lyon, et qui s’attend à une journée record
Sources 24 h
Posté par Adriana Evangelizt