« Régimes spéciaux » ou défense des droits sociaux ?

Publié le par Adriana EVANGELIZT

« Régimes spéciaux » ou défense des droits sociaux ?

 Monde Diplomatique

La voie semblait toute tracée. Après avoir utilisé la « technique du salami » pour attaquer tranche après tranche le droit à la retraite après trente-sept années et demi de cotisations (d’abord les salariés du privé, puis les fonctionnaires, enfin les « régimes spéciaux »), le gouvernement et le patronat se préparaient à imposer quarante et une puis quarante-deux années de cotisation. Il suffirait, pensait-on, d’invoquer les perspectives de « faillite » (ainsi que le fit, le 21 septembre, le premier ministre François Fillon), ou l’urgence, ou l’ « équité » entre salariés. Comme si la pénibilité des tâches (travail de nuit, effort physique, exposition aux produits toxiques et aux intempéries) ou l’espérance de vie étaient « équitables » entre un conducteur de train de fret ou un agent d’EDF et un ministre des cultes. Comme si la première urgence du gouvernement n’avait pas été de réduire massivement — et assez peu équitablement — quelques-uns des impôts acquittés par les contribuables les plus fortunés (1).

M. Nicolas Sarkozy était vraisemblablement disposé à engager une épreuve de force « à la Thatcher » en substituant les cheminots français aux mineurs britanniques. Il n’est plus tout à fait certain qu’il aille au bout de cette voie. Pourquoi ? Ce ne sont ni les grands médias, particulièrement âpres contre les grévistes, ni les sondeurs, exceptionnellement empressés au service du gouvernement, qui l’ont fait hésiter. Mais, d’une part, a joué la détermination des salariés dont les conquêtes sociales sont mises en cause : la grève du 18 octobre dernier et celle d’hier ont été particulièrement suivies. Ensuite — surtout ? — on ne peut pas exclure la crainte gouvernementale d’une « contagion des luttes » dans l’hypothèse où les fonctionnaires auraient relayé la semaine prochaine les cheminots, les électriciens et les agents de la RATP. Et l’auraient fait alors que le climat social est déjà marqué par de fortes protestations étudiantes et par un mécontentement général face à la baisse du pouvoir d’achat.

La volonté du pouvoir de passer en force n’est pas écartée, surtout s’il parvient à faire éclater un « front syndical » assez fragile et à l’intérieur duquel on trouve toujours une organisation ou deux impatientes de jeter l’éponge. Toutefois, depuis hier, ce n’est peut-être plus la seule option envisagée à l’Elysée.

(1) Alors que l’exonération de cotisations sociales des « stock options » fait perdre 3 milliards d’euros par an (soit le tiers environ du déficit actuel), leur imposition vient d’être reportée à 2012 par le Parlement.

Sources Monde Diplomatique

Posté par Adriana Evangelizt

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